AVIS DE L’ACADÉMIE VÉTÉRINAIRE DE FRANCE SUR L’HOMÉOPATHIE VETERINAIRE
Cet avis se fonde sur le rapport consultable sur le site academie-veterinaire-defrance.org
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L’Académie Vétérinaire de France : Considérant que :
l’Académie Vétérinaire de France (AVF) est soucieuse de la qualité et de l'éthique de la médecine vétérinaire. En France le terme de médecine vétérinaire se rapporte à la médecine vétérinaire conventionnelle enseignée dans les écoles vétérinaires publiques ;
le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires a interpellé l’AVF afin de savoir si l'homéopathie vétérinaire était compatible avec les exigences scientifiques de la pratique médicale des docteurs vétérinaires et avec les règles de bonnes pratiques professionnelles qu'ils doivent respecter ;
l’Académie nationale de médecine (ANM) et l’Académie nationale de pharmacie (ANP) ont rendu un rapport commun indiquant leur position sur l’homéopathie ;
l’AVF propose d’apporter sa contribution à la réflexion sur l’homéopathie dans le champ de l’enseignement et la pratique de la médecine vétérinaire ;
Observant que :
la question posée s’inscrit dans le cadre d’une attente sociétale pour des médecines vétérinaires alternatives et complémentaires dont il faut tenir compte ;
des vétérinaires et des détenteurs d’animaux déclarent des résultats positifs avec cette médecine et que, dès lors, on ne peut rejeter tout intérêt pour cette pratique ;
le vétérinaire a le devoir de prendre des décisions médicales justifiées en combinant expérience personnelle et données scientifiques ;
Constatant que :
les fondements de l’homéopathie reposent sur trois théories historiques : les similitudes, l’infinitésimalité et l’individualité ;
la théorie des similitudes, érigée en « loi », a pour base des répertoires de pathogénésies aux sources scientifiques mal définies et à l’évolution empirique au cours du temps ;
l’homéopathie vétérinaire se réfère à des pathogénésies déterminées essentiellement pour l’espèce humaine et ensuite transposées directement à l’animal ;
fondée sur l’approche individuelle, elle préconise pourtant le traitement de lots d’animaux ou de troupeaux ;
les pratiques homéopathiques vétérinaires peuvent ne retenir de leurs propres principes fondamentaux que l’infinitésimalité, en faisant totalement abstraction du principe de similitude ;
ni en médecine humaine, ni en médecine vétérinaire, au stade actuel, les études cliniques de tous niveaux n’apportent de preuves scientifiques suffisantes pour soutenir l’efficacité thérapeutique des préparations homéopathiques ;
chez l’homme l’effet placebo avec attente est la seule explication plausible, mais aussi suffisante, des effets de l’homéopathie en l’état actuel de la science, mais également des effets non spécifiques associés à tout acte thérapeutique ;
chez l’animal l’effet contextuel est la seule explication plausible, mais aussi suffisante, des effets de l’homéopathie en l’état actuel de la science ;
les préparations homéopathiques vétérinaires ont un statut règlementaire spécifique et ne sont pas soumises à l’autorisation de mise sur le marché prévue pour les autres médicaments ;
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il peut arriver que des préparations homéopathiques soient présentées comme étant des «vaccins homéopathiques » ;
Recommande que :
aucune discipline médicale ni aucune pratique à prétention médicale ne puisse s’exonérer d’un devoir éthique de mise à l’épreuve ;
à cet égard des études cliniques portant sur l’individu, permettant de concilier rigueur scientifique et contraintes pratiques, soient explorées et en particulier les essais de taille 1 (N of 1 trial) décrits en médecine humaine ;
la médecine vétérinaire soit définie comme une médecine fondée sur les faits et les preuves et ne soit pas qualifiée d’allopathique ;
il soit réaffirmé que la médecine vétérinaire doit être avant tout globale et qu’en conséquence le qualificatif de médecine vétérinaire holistique ne puisse être accaparé par des pratiques particulières ;
l’homéopathie, en médecine vétérinaire, à l’instar de ce qui prévaut en médecine humaine, ne soit pas reconnue ni ne puisse être revendiquée actuellement comme une activité médicale vétérinaire exclusive ;
une communication institutionnelle apporte une information permanente sur la démarche scientifique, la médecine fondée sur les preuves et les médecines complémentaires, adaptée respectivement aux vétérinaires, au grand public et notamment aux détenteurs d’animaux ;
le vétérinaire qui, en l’absence de démonstrations scientifiques reconnues, en particulier sur l’efficacité de l’homéopathie, voudrait poursuivre cette activité, notamment en tant que médecine complémentaire, prenne pleinement conscience de l’engagement accru de ses responsabilités en raison de l’absence actuelle de confirmation scientifique de l’efficacité ;
il soit possible de recourir à des préparations homéopathiques, dans la mesure où la décision médicale de l’utilisation d’une thérapie complémentaire et non alternative appelle systématiquement un consentement éclairé et que celle-ci n’induise pas une perte de chance en retardant la procédure diagnostique et/ou l’établissement d’un traitement reconnu efficace ;
que, pour la bonne information nécessaire au recueil d’un consentement éclairé, une prescription de préparation homéopathique soit assortie, sur tout support adapté, d’une mention selon laquelle, en l’état actuel des connaissances, l’homéopathie vétérinaire relèverait d’un effet contextuel ;
la dénomination « médicament homéopathique » soit à terme remplacée dans les textes – communautaires et nationaux - par celle de «préparation homéopathique », qu’il soit précisé sur l’étiquetage: « l’efficacité de la préparation n’a pas été démontrée selon les normes en vigueur », et que les préparations homéopathiques ne puissent revendiquer sans sanction pénale les propriétés des vaccins et ne puissent les remplacer ;
en médecine vétérinaire, aucun diplôme universitaire d’homéopathie ne soit délivré par les écoles et autres établissements publics, que la formation à l’homéopathie ne puisse s’effectuer que dans le cadre d’une formation prenant en compte les réalités de la démarche scientifique ;
dans le cadre de la formation initiale, les écoles vétérinaires soient des lieux de débat et de formation à l’esprit critique, en proposant des séminaires interdisciplinaires de réflexion sur les approches non conventionnelles ;
le code de déontologie vétérinaire, dans une prochaine version, fasse explicitement référence, dans le paragraphe concernant l’exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux, aux bonnes pratiques professionnelles fondées sur les preuves scientifiques et les données acquises de la science ;
l’attention soit attirée sur la difficulté représentée par l’injonction toujours faite aux éleveurs en agriculture biologique de recourir en priorité à des pratiques telles que l’homéopathie, alors que, dans tous les cas, avec le souci hautement légitime d’utiliser le moins d’intrants possible, l’injonction devrait être de recourir à des thérapeutiques scientifiquement éprouvées.
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Glossaire
Effet contextuel : correspond à l’ensemble des effets non spécifiques qui en médecine vétérinaire renvoient principalement aux biais subjectifs correspondant aux modifications d’appréciation et de jugement portés sur les critères de la maladie et leurs évolutions par le prescripteur et le propriétaire.
Effet placebo avec attente : phénomène neurobiologique scientifiquement établi, dont la réalité est attestée par des essais cliniques contrôlés, et les mécanismes éclairés par les neurosciences. Il est prouvé que sa puissance dépend de l’attente du patient, de l’annonce qui lui est faite, et de ce qui lui est proposé. Ces effets sont au cœur du ressenti bénéfique de l’acte d’homéopathie comme de tout acte thérapeutique bien mené, qu’il soit inclus ou non dans une thérapeutique complémentaire.
Pathogénésie : notion spécifique aux homéopathes, c’est l’ensemble des signes (ou symptômes) provoqués par l’expérimentation d’une substance sur plusieurs personnes censées être en bonne santé.
Similitude : un malade est guéri par une substance qui, administrée à un sujet sain, produit sur lui les signes et symptômes observés chez ce malade